Société de Pharmacie de Bordeaux
PIERRE ÉMILE ARNOZAN (1815-1888) d'après Vergnet (Laurent) - Sur quelques pharmaciens bordelais du XIXème siècle. Thèse Doct. Pharm. Univ. Bordeaux II, 1992, (80), 33-37 (258 p.)
portraits

Fils de Arnaud Arnozan, chirurgien, et de Clarisse Louise Marguerite Grandou, il est né à Bordeaux, 11 rue Fondaudège, le 20 janvier 1815. Le 15 juin 1847, il se marie avec Françoise Clémence Louise Giard (née à Bordeaux le 30 octobre 1824), fille de négociant, demeurant rue des Trois Conils.

Pharmacien d'officine au 40 Allées de Tourny, il jouit d'une excellente réputation et Jean Balde (nom de plume de Jeanne Alleman (1885-1938), amie de Marguerite Arnozan, la petite-fille d'Alfred Arnozan), dans La maison au bord du fleuve, nous dresse son portrait :

« … Alfred Arnozan incarnait la conscience professionnelle. C’était un homme de grande taille, invariablement sanglé dans une longue redingote noire, le col ceint d’une cravate blanche. Dans la rue, on le rencontrait coiffé d’un sévère chapeau haut de forme. En ce temps-là, on ne plaisantait guère avec la tenue. Aussi, quel respect il imposait ! Et quelle confiance ! Plus d’un médecin, signant une ordonnance délicate, ne manquait pas de recommander : ‘Apportez-la chez Arnozan" ».

« … Une pharmacie de l’ancien temps ne ressemblait guère à celles d’aujourd’hui où l’on ne débite guère que des spécialités. C’était l’époque des potions parfumées, des onctueux sirops... On pesait minutieusement, on malaxait dans un petit mortier de marbre au coin du comptoir, on dosait des poudres. Les fioles coiffées de papier plissé n’étaient pas expédiées en caisses. Il y avait un art des onguents et des collyres.

Dans le cadre sévère d’une officine à l’ancienne mode, fleurant bon la pâte de guimauve et les herbes odoriférantes, M. Arnozan accueillait ses clients avec bonté et urbanité, les faisait asseoir, les écoutait. L’ordonnance lue avec grande attention, il se tournait vers son interlocuteur, s’inquiétait avec soin de l’état de santé du malade et, avec des yeux empreints de malice, lui disait souvent : "Pensez-vous que ces remèdes lui feront du bien ?". À l’entendre parler, on aurait pu croire que la vente des produits pharmaceutiques lui était totalement étrangère. Cet homme était, comme son fils Xavier, d’un doux scepticisme ; il pensait que la natura medicatrix était le premier remède et son arsenal se réduisait à une vingtaine de produits.

fruits

Malgré ce désintéressement, sa pharmacie était des plus achalandées. Le public savait que ce praticien était un homme honnête et consciencieux et ses préparations irréprochables. Décelait-il dans certaines drogues une origine douteuse ? Il les rebutait. Un voyageur étant entré chez lui pour lui proposer des substances à très bas prix, se vit mettre à la porte avec cette phrase : "Monsieur, si vos produits sont bon marché, ils ne valent rien, je n’achète que des produits chers"

Alfred Arnozan faisait partie de la Société de Médecine et, quoique simple pharmacien, il eut l’honneur de présider cette docte compagnie ; c’est dire l’estime dans laquelle il était tenu par le corps médical bordelais ».

C’est l’un des plus anciens membres de la Société de Pharmacie de Bordeaux dont il est secrétaire général de 1851 à 1855 et président à deux reprises : en 1850 et en 1861. Inspecteur général de la Salubritéé de Bordeaux pendant trente ans, il est également membre de la Commission préparatoire du Congrès de Pharmacie de Bordeaux (les 17 et 18 aout 1859) et vice-président de l’Association des Pharmaciens du Sud-Ouest en 1860.

Il meurt à Bordeaux le 3 mars 1888, laissant son officine à son fils Gabriel né le 5 juin 1848. Il convient de citer également son autre fils, Xavier, né le 12 novembre 1852, qui sera un éminent professeur à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Bordeaux où il occupera les chaires de dermatologie, de thérapeutique et de clinique médicale.

 

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